Paris - Nice - Moscou en train - Avril 2011

Voyage retour : Moscou - Cologne - Paris


Russie - Pologne

 

 

Cette fois, le train est bondé. Nos valises sont lourdissimes, leurs coutures, prêtes à craquer. Notre provodnic nous aide à les monter et on découvre notre nouvelle cabine. Minuscule. Mauvaise surprise, nous serons bien trois à y dormir. Il y a une jeune femme russe avec nous. Elle s'absente souvent dans la cabine jumelle, étroit dortoir d'hommes. Elle vient se coucher tard, après que nous nous soyons longuement débattues avec nos housses de couette. Les lits étaient à faire entièrement.

 

Avant de dormir, on a eu doit à une crise de rire avec ma mère. Un "russe bourré" est entré dans notre cabine (encore en position banquette), sa bouteille à la main. Je le surveille du coin de l'oeil quand survient un autre beuglant à la main avec - pas de jaloux - sa bouteille en main. On se regarde (oui je peux jeter le "regard-qui-tue") et maman me traduit ce qu'il vient de dire "Qui veut des boissons ? Mais... pourquoi elle fait cette tête-là, celle-là ??". Bref, c'était un vendeur.

La nuit est aussi bizarre qu'elle puisse être dans un train. La promiscuité est telle que je ne peux même pas tenir assise dans ma couchette. Maman et la jeune femme soufflent à tour de rôle pour ne pas dire qu'elles ronflent comme des sapeurs. Puis elles sortent chacune leur tour en direction des toilettes. Notre porte s'ouvre toute seule, bat dans le couloir. Je n'arrive pas à la refermer sans risquer de tomber, je renonce. Je suis fatiguée et leurs escapades me semblent durer l'éternité.

Vers 10 heures du matin, notre voisine de couchette dort encore. Nous allons au wagon-restaurant. On a dépassé Minsk et il reste trois heures jusqu'à Brest, le poste frontière avec l'Europe. J'ai mangé du muesli et maman commande une omelette. 350 roubles, nos tout derniers sous. Ce n'est ni bon, ni propre. Mauvais prestataire pour la RZD. Quand je pense à l'espace formidable que nous avions à l'aller mais morne, sans vie, sans agitation.



Cette fois, le personnel est plus sympathique. Le train est bien plus chauffé alors que nous nous acheminons vers le vrai printemps de l'Europe occidentale.


 

Drôle de trajet, nous avons déjà passé le fuseau horaire de Minsk (-1h) et bientôt celui de la Pologne/Allemagne. Mine de rien, cela nous rajoute deux heures de trajet psychologiques. Notre comparse est descendue avec ses amis dans la ville biélorusse de Baranavicy où habite sa grand-mère.

 

 

 

On passe le poste-frontière de Brest. Quelqu'un ramasse nos passeports et un douanier nous demande combien on a d'euros sur nous, si on en a plus de 1000. Je me marre car il m'en reste 6 à peine et 15 kopeck. Puis c'est le toujours très impressionnant changement de bogies qui emploie un nombre incalculable de gens.

 

Ce que je n'avais pas vu à l'aller, ce sont ces femmes biélorusses de 40/50 ans qui défient le danger des voies et surtout de l'atelier pour essayer de nous vendre des boissons, des barres chocolatées, des mouchoirs... Une femme essaye de rentrer dans notre wagon et se fait littéralement "jeter" dehors par nos provodnic à grands coups de "dégage".

 

 

A noter que le taux de change roubles/euros a dû exploser dans la nuit. Hier soir, un thé était facturé 16 roubles et ce matin... 60 ! Soit trois euros les deux thés, chapeau l'artiste. Il n'est pas cher dans le crasseux wagon-restaurant qui -j'espère - est en train de se faire raccrocher ailleurs.


 

A Brest, les militaires/douaniers sont plus tendus que jamais  à cause des attentats du métro de Minsk. A l'aller, on a pu se déplacer dans la gare de Brest mais cette fois un policier nous demande de rester près du train. On fait une pose de cinq minutes. Quel bonheur de sortir dehors. Le temps est admirable. Puis on reprend le chemin, le court chemin vers l'UE avec le passage du poste-frontière de Terespol en Pologne. On est contrôlées plus légèrement qu'à l'aller, logique dans ce sens. Le douanier nous demande simplement si on transporte de l'alcool et des cigarettes. A l'aller, sa collègue avait fouillé notre banquette et nos valises, m'avait dévisagée...


 

Ouf, de nouveau, nous avons un super wagon restaurant polonais de la chaine Wars. Salades, bières, boissons.

 

On papote un peu avec notre voisine russe, médecin retraitée qui partage son temps et son énergie entre Bruxelles et Moscou. Elle a choisi ce moyen de locomotion parce qu'elle a peur dans l'avion. On se met bien tôt au lit en prévision de notre lever à 5 heures du matin.

 


13/09/2011
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Fire walk with me : Allemagne

Mais une odeur épouvantable de brûlé me réveille brutalement vers 1h30 du matin. Là je pense très sérieusement que notre wagon est en feu mais aucun détecteur ne s'est déclenché. Je réveille maman qui ne tarde pas à aller prévenir la provodnic. Plusieurs passagers sont déjà rhabillés. On apprend dans le brouhaha que nos freins ont brûlé car ils étaient restés bloqués. Nous sommes dans un des derniers wagons, les autres (d'origines allemande, polonaise, néerlandaise) étant neufs. Après le wagon-restaurant, nous avons pris l'habitude de remonter le temps jusqu'aux années 50.

Le train s'arrête tant bien que mal dans un no-mans land que je situerais au delà de Berlin. On nous annonce deux heures de retard et surtout un arrêt/terminus d'urgence à... Dortmund.

Notre voisine de cabine Elena me fait rire intérieurement alors qu'elle ouvre de grands yeux en prononçant le très international "Ka-chmar !!". Il faut la voir.

 

Me voilà habillée, maquillée, rafraîchie, et il est à peine 6 heures du matin ! On attend fébrilement Dortmund. Sur place, on est lâchés parmi les fauves et on se démerde (désolée, c'est le mot qui convient) pour trouver un train pour Cologne et bien sûr, on n'échappe pas à une kyrielles de marches. Je hisse ma valise qui fait presque 50% de mon poids à bout de bras. très vite, un allemand vient à ma rescousse. Nous montons dans le train rapide ICE. Hélas, il ne s'arrête pas à la gare principale de Cologne. On arrive à 8h42 à la gare "Messe" qui est à 10 minutes à pied de l'autre. Heureusement, ce seront dix minutes à plat, sans aucune marche et une belle traversée du Rhin.

 

Il est très tôt, il fait beau. Cologne - déjà une de mes villes européennes favorites - est un régal absolu. On se débarrasse vite fait de nos valises à la consigne. De minutes en minutes, les rues se remplissent de touristes de week-end. J'emmène maman et deux russes dans mon salon de thé fétiche, le café Reichard en face de la cathédrale et nous prenons le petit-déjeuner avec leurs traditionnels couverts en argent.

 

On commence à se balader toutes les quatre. Très vite, Elena qui ne parle pas allemand me demande de traduire ses billets Thalys. Je me rends compte qu'elle en a acheté deux au lieu d'un. Nos chemins se séparent là. On se met à chauffer au soleil après dix jours de grand froid, on bulle.

 


13/09/2011
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Cologne - Paris-Nord

 

Un petit pincement au coeur quand nous montons dans notre Thalys. Tout aurait été parfait s'il n'y avait eu ce grand sac noir abandonné depuis plus d'une demi-heure. Notre steward pense que c'est un sac volé et finira par retrouver sa stupide propriétaire partie discuter dans un autre wagon. Faussement vindicatif, il ne lui épargne pas l'humiliation publique.


 

Le train va s'arrêter à Aachen, Liège et Bruxelles avant notre terminus à Paris-Nord. Moscou est loin, loin. Je commence seulement à réaliser le chemin parcouru, quelques milliers de kilomètres, le fessier collé à la banquette, collée au rail. J'ai parlé toutes les langues possibles : allemand, anglais, français, espagnol... J'ai commencé à baragouiner en russe. Je n'y retournerai pas sans connaître les mots basiques car ils sont si peu là-bas à parler l'anglais.


 

Je me souviens de Pâques en Russie, enfin de sa préparation, la préparation d'une grande fête religieuse et me voilà bientôt dans son pendant français : la fête du chocolat. Sacrés français !

Il reste une demi-heure de train jusqu'à Paris-Nord. On aperçoit l'aéroport de Lille, des éoliennes non loin d'Amiens. Encore une heure et on aura atteint nos 100 heures de train, pas si pénibles que ça finalement. J'ai la sensation du bonheur, du devoir accompli. J'ai le coeur qui pétille quand je pense que je vais revoir mon petit garçon, c'est encore une question d'heures, de si peu d'heures.  J'ai des étoiles dans la tête. Quand je pense à Moscou, je pense et je penserai toujours aux délicieuses "mamies" des musées. Belles et dignes.
Si j'étais une grande main, je les aurais délicatement ôtées de leur siège rudimentaire pour les mettre au chaud pour une retraite bien méritée. Certaines tricotaient, certaines rêvaient, certaines s'assoupissaient, mais avec toutes il s'est passé quelque chose d'inexplicable. C'est l'humanité, je crois. Combien m'ont prise dans leurs bras ? Demandez à ma mère. La fille, le mère, ça les a bouleversées mes mamies russes !


Le 21 avril 2011, pour la dernière fois, je me suis réveillé sur le très beau Sleeping Satellite de Tasmin Archer. Et plus j'y pense, plus je trouve que ce titre colle parfaitement à Moscou.

Moscou est et demeurera mon satellite assoupi.


14/09/2011
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