Ligne Nice - Moscou : Belarus
Terespol(Pologne) / Brest (Biélorussie), nuit du 11 avril 2011
En pleine nuit, arrêt brutal et décrochage du wagon-restaurant en gare de Varsovie. Il est 3h30 du matin. Une photo rapide et je me rendors car à peine deux heures plus tard nous sommes réveillés en catastrophe en gare de Terespol, dernière ville polonaise avant Brest (prononcer Briest) en Biélorussie. Trois, quatre officiers viennent vérifier les passeports (je me demande comment ils arrivent à m'identifier, réveillée en sursaut et avec mes lunettes...) puis c'est au tour des "brestois de l'Est" d'investir le wagon, de fouiller nos valises "vous avez de l'alcool, vous avez de l'alcool ??". Eh bien non Madame !
Les marais de Terespol font froid dans le dos par ce temps.
Un officier avec une immense casquette gris-vert (impressionnant et ne nous rappelant pas que de bons souvenirs) part avec mon passeport et me demande dans le même temps de remplir ma carte d'immigration, ce qui nécessite des infos contenues dans le passeport. Je me débrouille pour qu'il remplisse ça tout seul.
Bogies
Je n'ose pas trop prendre de photos car on a plongé dans une nouvelle ambiance et quitté l'UE. Bientôt on entre dans un atelier pour le fameux changement de bogies (les blocs de roues qui sont plus hauts en Russie et Biélorussie). Hallucinant ! On est séparés en autant de wagons et d'un coup c'est le nôtre qui se soulève. Je ne pensais pas qu'on allait nous laisser dedans ! Je remarque que nos provodnics commencent à se détendre un peu et on a même droit à un sourire d'Iélena.
L'atelier de changement de bogies. L'arrêt dure une bonne heure. Mes photos retour sont mieux - voir plus loin.
Notre train retour ??
Partout des forêts de bogies...
On nous laisse 40 minutes en gare de Brest. Sur un autre quai, j'entrevois notre train retour du 21 avril (via Berlin). Iélena a gardé nos billets de train aller. Le plan foireux se profile. On va juste se détendre les pattes sur une grande passerelle bleue.
Première opportunité de s'extraire du train depuis Nice, on apprécie.
Puis le train repart. On cherche le wagon restaurant devenu soudainement aussi rouge que russe. Les prix se sont divisés par trois aussi. Je récupère mes premiers roubles en retour de monnaie.
Bélarus
C'est notre dernière journée de train. On va arriver vers 21h37, ce qui fera 23h37 à l'heure moscovite. On a rien vu de la Pologne cette nuit mais ce sera le cas au retour. Aujourd'hui c'est par contre la journée biélorusse.
Les paysages sont tristes et brumeux, très marécageux. Je vois les premières forêts de bouleaux, les blocs type HLM et des petits villages d'agriculteurs avec des maisonnettes plus colorées. Le train va vraiment plus vite. Hier on s'arrêtait sans arrêt devinant que le Nice-Moscou n'est jamais prioritaire sur les lignes de l'UE. On s'est arrêté au moins quinze à vingt fois pour laisser passer d'autres trains.
Petite nostalgie quand je pense aux dernières heures qu'il nous reste à passer dans ce train. A l'inverse, je n'en peux plus d'être confinée et j'ai une furieuse envie de marcher, courir, grimper.
La Biélorussie est comme je l'imaginais. La récente fonte des neiges crée des paysages de gadoue. Les bâtiments sont grisâtres. On aperçoit de très nombreux baraquements, tout petits. On dirait des garages mais bien souvent il y a des évacuations sur les toits et jamais de fenêtres. Est ce une sorte d'ensemble de remises pour des habitants d'immeuble ? Vraisemblablement. Ils sont numérotés.
Quelques bouleaux parsemés avant de ne plus voir qu'eux en Russie.
Minsk, 12 avril 2011
Dans le quart d'heure, nous arrivons en gare de Minsk. Nous n'apprendrons que quelques jours plus tard la nouvelle de l'attentat qui a frappé une station de métro du centre-ville. Il y a un rayon de soleil dehors. J'écoute la jolie voix de Katy B dans les écouteurs. Elle réveille les paysages endormis du Bélarus. A ce propos, j'ai besoin, j'ai juste besoin de voir un russe ou un biélorusse sourire de bon coeur. Dans dix jours ? De retour ? Demain ?
Vu du train, difficile de dire si Minsk est une belle ville. J'aperçois quelques immeubles particulièrement laids ou barriolés. Et par contre, pour la première fois, des gens et quelques rares enfants.
Minsk vue du train.
Smolensk, 12 avril 2011
Nous allons dîner au wagon restaurant. Très vite, nous sommes abordées par trois jeunes russes imbibés habillés en costume. Ils sont montés à Smolensk. Le plus étonnant c'est qu'ils s'assoient directement à notre table. Ca donne du "Sophia, Sophia" dans tous les sens sans oublier les "ta mère est super". Maman choisit de feindre de ne pas parler russe. Elle me raconte après qu'à ma question de savoir ce qu'ils faisaient dans la vie, l'un a dit à son collègue "dis qu'on est des business-men sans préciser". C'est un mot qui reviendra souvent en Russie. On met quasiment une demi-heure à s'en débarrasser.
On a vraiment hâte d'arriver, sauf quand on voit les marécages semi-gelés qui se multiplient...